Je suis le fruit d'une union sacrée, mélange d'air et d'eau, je suis une tempête en plein mois de juillet. J'ai été élevée dans une prison dorée dont je n'ai jamais su me sauver. Petit ange bien trop adorée, on m'a caché le monde et toute sa beauté. J'aurais voulu voir, explorer, me dire qu'ailleurs mérite que se perdre mon cœur. J'ai dessiné les nuages avant de savoir parler, m'amusant de leurs formes et de voir le ciel changer. J'inventais un univers présidé par mes soins, mes envies et mes rêves enfantins.

J'ai su faire pleuvoir sans jamais faire pleurer. Changeant leur ciel au grès de mes idées, perdu au milieu de cet amour que mes parents me donnaient. Dans leur certitude de me protéger, ils étaient parfaits. J'étais une Alice aux pays des contes de fée, pays où mon père me racontait des centaines d'histoire où j'étais l'héroïne qui a la fin gagnait. Pays où ma mère m'embrassait avant d'aller se coucher. Une vie parfaite dans une abondance d'absolument tout ce qu'il me fallait pour grandir comme ses enfants bien trop gâtée.

Oui une vie teintée de perfection qui m'a guidé vers ce pourquoi je suis née. Sauver le monde entier. Mes parents m'ont transmit toute leur bonté, tous ce qu'ils ont pu faire quand ils exerçaient, quand la retraite ne les avait pas encore gagné. Ils ont donné au monde un peu de leur espoir et je sais que c'est ce qui guidera mes pas, à chaque fois. Cependant, je ne peux nier que la vie qu'ils m'ont offert reste à demi mesurée, je ne sais des gens et de la Terre que ce qu'ils ont bien voulu me montrer et mon ignorance pèse parfois sur mes pas. Sur ses choses que j'aimerais faire alors que je ne les connais pas.

Complétement à côté de la réalité sur certains sujets, je m'insupporte de ne pas savoir argumenter sur tous ce que le monde considère comme vérité. Je me maudis un peu à certains moments, parce que je ne sais réagir correctement devant ce que les autres appellent difficultés. Je suis fascinée par ces personnes si différentes de moi, celles qui connaissent tout ce que je n'ai jamais vu, jamais appris, tout ce que mes parents m'ont caché lorsqu'ils évoquaient le monde et sa voracité. Les autres, ceux que je n'ai jamais côtoyés me semblent si vrais sans les connaitre, vrais par leur expérience, par ce qu'ils pourraient me raconter, que je ne peux m'empêcher de penser que malgré moi je suis passée à côté de centaines de choses que j'aurais aimé.

Je n'ai pas encore décidé de partir de chez mes parents, mais je sais qu'un jour d'orage je le ferais, un jour où je choisirais une nouvelle fois de cacher le soleil pour que le ciel annonce au monde entier mon arrivée dans ce qui me semble être la réalité. Je deviendrais vivante grâce à ceux que je rencontrerais, entière pour ceux que je sauverais. Et totalement moi, quand j'aurais tout vécu, tout fait.